Quid de la stratégie Européenne de la sécurité ?

On fait quoi après avoir monté nos drapeaux?
On fait quoi après avoir monté nos drapeaux?

Blog post sur LinkedIn, 09/12/2025, de Sven Franck (in Deutsch, in english)

TL;DR – La semaine dernière a été une révélation pour les transatlantistes, avec la publication de la Stratégie de sécurité nationale des États-Unis et Elon Musk, furieux après une amende de 140 M€ pour violation du Digital Services Act, appelant à la dissolution de l'UE. La réponse de l'Europe : nous sommes BFF, nous l'avons toujours été et nous le resterons. Vraiment ?

L'EUphorie !

Heureusement, beaucoup ont pensé autrement – et c'était motivant de faire défiler X noyé sous les drapeaux européens 🇪🇺. Même Manfred Weber a participé - comme si le PPE n'avait pas tout juste voté, aux côtés de forces antidémocratiques et pro-américaines, pour rogner largement ce qui fait l'essence même de l'Europe. "Gotta go with the flow", j'imagine. Soyons-en sûrs : une fois l'EUphorie retombée, le PPE arrachera une nouvelle dent réglementaire à l'Europe avec l'omnibus numérique – s'alignant ainsi sur les exigences de l'industrie technologique américaine, désireuse de supprimer précisément les garde-fous qui ont permis d'infliger cette amende à Elon Musk – voir aussi l'analyse d’Alberto Alemanno.

Je suis d'ailleurs curieux de voir si la Commission ira jusqu'au bout de l'omnibus. Les États-Unis n'ont pourtant pas fait mystère de leur ambition : à l'instar du Venezuela, l'Europe est un continent nécessitant un changement de régime. Et désolé, les conservateurs n'ont pas encore suffisamment basculé à l’extrême droite pour y participer - surtout pas au niveau européen, que les États-Unis préféreraient voir disparaître simplement. « Diviser pour régner » est le nom du jeu, et votre parti national d'extrême droite respectif s'y prête avec enthousiasme à sacrifier notre unité européenne pour le bref moment de gloire nationale.

Encore des mots sans actes ?

Les dirigeants nationaux sont donc confrontés à un dilemme : ils doivent céder du pouvoir. Soit à une Union européenne capable de défendre nos valeurs, notre liberté et notre démocratie libérale. Soit à ceux qui bénéficient du soutien des États-Unis. L'AfD et le Rassemblement national font des scores records aux sondages en Allemagne et en France, et pourtant les plus grands États membres de l'UE restent incapables de s'engager clairement en faveur de l'approfondissement européen. Combien de brandissements de drapeaux faudra-t-il encore pour nous guider au moins un pas dans une direction plus européenne ?

Oui, la révision des traités prendra du temps. Mais pourquoi ne pas commencer par une Stratégie européenne de sécurité ? Ce ne peut pas être si difficile de remplir 33 pages, comme l'ont fait les États-Unis, surtout quand tout le monde invoque sans cesse une « Europe plus forte ». Alors, faisons-la ? La Stratégie globale de l’UE n'a pas été mise à jour depuis 2016 😬, et les États-Unis viennent tout juste de « magnétiser » la Boussole stratégique européenne de 2022. Le moment, c'est maintenant.

Même si cela devait rester symbolique au final, l’engagement des États membres de l'UE en faveur d'une Stratégie européenne de sécurité commune et actualisée enverrait un signal fort : celui de dirigeants réellement prêts à faire avancer le projet européen. Ou, à défaut, celui laissant aux citoyens le soin de choisir des alternatives lors des prochaines élections. Il est temps de jumpStartEU – d'une manière ou d'une autre.